par Pascal Grenier, bachelier en génie forestier.

Article paru dans Le carnet des simplicitaires et Le Soleil le 30 décembre; Le Devoir le 4 janvier et devant paraître dans le journal Droit de parole de février.

Le maire de Québec cherchait récemment de nouveaux objectifs pour 2016. Pourquoi ne pas prioriser la lutte à l’étalement urbain afin de donner une eau de bonne qualité aux citoyens de Québec, mais aussi  pour réduire la production de gaz à effet de serre (GES). S’attaquer à l’étalement urbain, c’est lutter contre le principal problème environnemental régional. Avec des autoroutes dans toutes les directions, limiter la dispersion urbaine serait un réel défi pour l’administration publique.

L’étalement urbain entraîne plusieurs conséquences telles : la construction de nouvelles rues, trottoirs, égouts et aqueducs, éclairage de rues, déneigement et enlèvement des ordures, transports public et scolaire, services de distribution d’électricité, de téléphone et service postal. L’étalement urbain entraîne aussi une plus grande consommation d’énergie, d’espace et d’eau de même qu’une plus grande production de déchets. La pollution atmosphérique est accrue tout en augmentant la congestion, le bruit et la baisse de qualité de vie dans le milieu urbain, à cause des autos des banlieusards.

De plus, l’étalement urbain est un véritable gouffre financier. À titre d’exemple, il faut ouvrir de nouvelles écoles en banlieue comme à Val Bélair l’an passé et cette année à Lac Beauport, alors qu’on en ferme au centre ville de Québec. Un autre exemple à trait aux réclamations d’aide de Stoneham et de Lac Delage pour la mise aux normes de leurs usines d’épuration des eaux usées, alors que Québec a dû investir 20M$ récemment pour améliorer le traitement de l’eau de la rivière St-Charles devenue de plus en plus polluée. Gouffre financier aussi  à cause de tous les déplacements que l’étalement entraîne; longs parcours soir et matin des banlieusards qui travaillent en ville, difficulté à fournir des transports publics de qualité avec un tissu social dispersé et transports scolaires de 3 à 5 fois plus cher en banlieue qu’en ville.

Comment réduire l’étalement urbain? Mentionnons que ce sont surtout les jeunes adultes qui sont attirés par la banlieue. Ils y recherchent la tranquillité, une meilleure qualité de vie, la présence de la nature et des espaces verts, un terrain plus grand, l’absence de pollution et un meilleur milieu de vie pour leurs enfants. Ceci se matérialise par une grande maison, dans un quartier propre et tranquille, une auto par adulte de la famille, une piscine, des jeux extérieurs pour les enfants et un carré jardin dans la cour.

Le problème est que cet idéal est en train de détruire la planète. La ville doit être conçue pour minimiser la consommation de ressources. Ainsi, les citoyens d’une ville peuvent, à la fois protéger l’environnement et en même temps s’assurer d’un cadre de vie très agréable. Pour y arriver la ville doit offrir des services publics de quartiers comme des piscines, des parcs avec jeux d’eau et glissades, des cours d’écoles avec jeux accessibles en tout temps, des bibliothèques, des patinoires intérieures et extérieures, des sentiers pédestres, des pistes cyclables, des jardins communautaires, des transports publics fréquents et fiables, etc.

La question du coût est aussi très importante dans la décision pour un jeune couple de s’installer en ville ou en banlieue. À première vue, il peut paraître plus avantageux financièrement de choisir la banlieue avec le prix des terrains et des taxes moins élevés. Toutefois, à moyen terme, les économies réalisées pour un achat en banlieue sont vite dépassées par l’achat d’une deuxième et parfois d’une troisième voiture, les déplacements soir et matin sur de longues distances sans compter la dépense en temps dû à la congestion. En ville, on peut vivre avec une seule, voire sans auto, en profitant de la proximité des services, des transports en communs et de la disponibilité de l’auto-partage. Les économies alors sont considérables.

La ville de Québec fait déjà des efforts pour densifier son bâti et aider les gens à s’installer en ville. Par exemple le récent programme « Accès famille » favorise l’achat d’une maison à Québec pour un jeune couple. Toutefois, ce programme pourrait être amélioré en retirant des parties excentriques du territoire comme Lac St-Charles et Val Bélair qui sont dans l’étalement urbain. La ville pourrait aussi faire l’achat de vastes lots pour constituer une banque de terrains qui pourraient être revendus, plus tard à prix réduits, en échappant à la spéculation foncière. Le récent plan particulier d’urbanisme de Sillery, avec l’ajout de 800 logements en centre-ville, est un pas dans la bonne direction. On pourrait faire la même chose pour les terrains vacants au centre-nord de Beauport. Par contre, l’élargissement de l’autoroute 73 entre Jean Talon et De La Faune n’est pas une bonne option. Elle n’est qu’une solution temporaire qui ne  fera qu’encourager l’étalement vers le nord.

Voilà donc tout un programme pour le maire Labeaume en 2016 et années suivantes. Oui il serait intéressant de faire du patinage, du kayak et de la pêche sur la St-Charles, mais l’aménagement viable de la ville, en réduisant la production de GES, demande beaucoup plus et est un véritable héritage à laisser à nos enfants et petits enfants.

Pascal Grenier, bachelier en génie forestier

Québec

(418) 529-7890